Episode 6

Bannière : "entretiens avec la nouvelle génération de professionnels du tourisme" Marie-Henh et Jennifer

Marie-Henh et Jennifer sont en Master 2 Tourisme et Développement de l’ISTHIA – Université Toulouse – Jean Jaurès. Elles clôturent avant les vacances d’été notre série d’articles « Entretiens avec la nouvelle génération de professionnels du tourisme ». Bientôt diplômées, elles nous présentent leurs parcours, leurs expériences professionnelles, leur formation, leur implication dans l’association du campus et leurs aspirations pour un tourisme au service du développement.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours  ?

Marie-Henh : Je suis actuellement en M2 Tourisme et Développement à l’ISTHIA (campus de Foix). Au lycée, je ne savais pas ce que je voulais faire. J’aimais bien les langues, les voyages et, je ne sais pas pourquoi, je me suis retrouvée en première année de droit à Bourg en Bresse. Rien à voir avec le tourisme ! Cela ne m’a pas convenu. J’ai décidé de suivre un BTS Tourisme à Macon afin de lier ma formation aux langues étrangères. Après le BTS, j’ai voulu poursuivre mes études dans le but d’aller au-delà de la commercialisation et de la vente. J’ai intégré la licence 3 en Tourisme et Développement de l’ISTHIA. Les sujets abordés pendant la licence m’ont plu. J’ai découvert que le tourisme était un vecteur de développement, qu’il pouvait être utilisé pour développer les entreprises ou les territoires. La notion de durabilité que je n’avais pas pu appréhender en BTS m’a passionné. Cette année-là, je suis partie au Canada faire un stage dans une structure d’hébergements écologiques. J’ai décidé de continuer en Master Tourisme et Développement de l’ISTHIA.

Suivre une formation en tourisme et développement ouvre des portes. Le tourisme est pour moi un moyen qui permet de développer un projet et non le centre de l’action. Si on se concentre sur le développement d’un territoire, on peut le développer par le tourisme mais pas que ! Le tourisme est un domaine très vaste, il y a tellement de secteurs, de métiers, de territoires. Pour le moment, je me concentre sur le tourisme mais peut-être que dans quelques années ce sera le développement. Je trouve que notre formation nous permet de réinventer le tourisme et les destinations. Nous pourrons grâce à notre formation répondre aux problématiques du moment et travailler à la relance du tourisme. Il y a du travail dans cette filière. En Master 1, je devais faire un stage au Vietnam en marketing et communication, mais cela n’a pas eu lieu à cause du covid. En Master 2, j’ai décidé de rester en France pour faire mon stage au Camping Sites & Paysages le Moulin à Martres Tolosane, en Haute Garonne. Je me charge du développement durable. Je travaille sur le tourisme itinérant, les communications liées à l’environnement, les démarches internes en termes de développement durable, d’environnement, de tri des déchets. Le camping est situé sur des voix de déplacements itinérants (vélo, randonnée), de déplacements doux et cela rentre dans la logique de développement durable que je tente de développer.

Jennifer : Je termine mon Master 2 Tourisme et Développement à l’ISTHIA. Après le bac, j’ai commencé une première année de communication à Paris VIII, mais ma formation ne correspondait pas exactement à mes attentes. J’ai arrêté et pendant un an, j’ai réfléchi à ce que je voulais faire. J’en ai profité pour créer une association avec des amis : Igny Trip (du nom de la ville où j’ai grandi). Le but était d’aider les jeunes à partir en voyage plus facilement. Nous avons pu créer trois bourses de voyages avec pour destinations : New York, les Iles Canaries, et l’Australie. C’est grâce à mon investissement dans cette association que j’ai pensé au tourisme comme domaine d’études. Je me suis inscrite en BTS Tourisme à l’ENC Bessières une très bonne école publique, réputée et exigeante. J’ai découvert les secteurs « classiques » du tourisme, j’ai appris à servir un client, vendre un produit. J’ai eu l’occasion de réaliser des stages chez un tour opérateur, en agence de voyages et le dernier dans l’association ATES (Association pour le Tourisme Equitable et Solidaire). Ce dernier stage a été une révélation pour moi. Il m’a permis de travailler avec la population, découvrir la gouvernance participative, et d’œuvrer à la création d’emplois locaux. J’ai voulu me spécialiser en développement des territoires et j’ai intégré la Licence 3 en Tourisme et Développement à Foix. En Licence, j’ai fait un stage avec une auto entrepreneure qui avait créé son entreprise de consultant en développement territorial. C’est là que j’ai découvert l’ESS : l’économie sociale et solidaire. Après ce stage, je me suis spécialisée au cours de mon master sur deux thématiques : l’ESS et les îles, car il y a encore beaucoup de travail à faire sur place. Sur les iles francophones que je connais ou même le Cap Vert (dont je suis originaire) les jeunes sont souvent encouragés à partir. Je trouve cela dommage. Il y a de réels enjeux de création d’emplois. J’ai fait un mémoire sur ce sujet. J’ai pu lier plusieurs thématiques : l’autonomisation des populations, la dépendance au continent. J’ai fait un stage chez France Active (rien à voir avec le tourisme) où je m’occupais de la reprise des associations et des entrepreneurs suite au premier confinement et j’ai proposé à mes responsables de travailler sur le tourisme social. Cette année, je suis chez la Ruche : un réseau d’incubateurs, d’espaces collaboratifs et de coworking qui se trouve dans toute la France. J’accompagne des femmes inspirantes à créer leur entreprises innovantes à impact social et/ou environnemental. On peut me demander : « où est le tourisme ? ». Ma formation abordant pleinement la question du tourisme et des territoires je voulais découvrir l’accompagnement d’entrepreneurs et par la suite pourquoi pas lier ces trois thématiques : tourisme, territoire, entreprenariat.

Comment se sont passés les cours à distance pour vous ?

Marie-Henh : En Master 1 nous n’avons pas eu de cours à distance. Le distanciel a commencé en Master 2 à partir du mois d’octobre. Les cours à distance nous permettent de continuer notre formation mais même si nous sommes motivés, il est parfois difficile de se concentrer. Nous avons de la chance car nos professeurs ont cherché à améliorer les conditions d’enseignement avec des actions qui peuvent paraître simples comme avoir un support pour suivre le cours, plus de pauses, plus de travaux en groupes. En Master 2, nous avons beaucoup de partiels en groupe. Nos cours magistraux à distance de trois heures sont composés d’une heure de cours et de deux heures au cours desquelles nous étions répartis dans des salles Zoom par groupe pour travailler à distance sur nos projets pour les partiels. Cela a été bien pensé.

Jennifer : Lors du premier confinement, nous avons eu uniquement notre mémoire à rédiger donc cela a occupé les journées. En revanche en Master 2, nous n’avons eu qu’un mois de présentiel. Nous avons été déçus de ne pas pouvoir nous voir. J’ai de la chance car à Foix je suis en résidence universitaire, comme plusieurs camarades de classes. Je n’ai pas trop ressenti la solitude même si les moments informels de pauses, aller à la bibliothèque, voir nos profs manquent. C’est vrai que nous avons a eu beaucoup de travaux de groupes, mais ce n’est pas toujours facile en visio, mais cela nous apprend à utiliser de nouveaux outils, à être patients.

Vous êtes actuellement en stage, quelles sont vos missions ?

Marie-Henh : Pour le choix de nos stages, nous ne sommes pas limités au domaine du tourisme. Nous pouvons aussi chercher dans le développement local, le développement des entreprises… Je réalise mon stage de Master 2, dans un camping dans lequel j’avais déjà été en stage lors de mon BTS. J’ai pu les recontacter et construire mes missions avec eux. Mon stage me permet de travailler sur le développement durable en entreprise et de voir comment une structure peut mettre en avant ce qu’un territoire propose. Par exemple, le camping est situé près de voies de déplacements doux et d’itinérance à vélo et pédestre. Itinérances douces qui sont valorisées par le territoire de la Haute Garonne. L’idée pour le camping est de développer cette offre d’itinérances notamment par la labélisation vélo et pédestre. Je travaille donc à ce que le camping réponde aux critères permettant la labélisation. Ma deuxième mission concerne la RSE (responsabilité sociale des entreprises). Le camping étant une petite entreprise, ici cela concerne le bien-être des employés et la sensibilisation en interne au tri des déchets, au compostage. Aussi, je m’occupe de la communication durable et environnementale. Le site est situé sur une zone Natura 2000. Nous souhaitons sensibiliser les visiteurs à l’environnement par la communication. Pour le moment la communication sur laquelle je travaille se fait par affichage. A l’avenir, il pourra être intéressant de faire des animations auprès des touristes et des ateliers recyclages pour les employés. C’est important d’échanger avec les touristes sur l’environnement car les comportements ne sont pas les mêmes en vacances et au quotidien. Mon stage dure 6 mois (de début mars à fin août), ce qui me permet de préparer la saison et de voir si ce que je fais à un impact. A la dernière quinzaine d’août je pourrais faire un feedback dans mon mémoire pour voir ce qui a fonctionné ou non.

Jennifer : J’ai postulé très tôt. J’ai répondu à uniquement trois annonces car je voulais vraiment faire ce qui me plaisait (j’avais déjà mon sujet de mémoire en tête). C’est peut-être un peu risqué mais ça a payé. Notre stage de Master 2 doit être lié au mémoire. J’ai eu de la chance car j’avais ce sujet de mémoire sur les structures d’accompagnement dédiées aux entrepreneurs et j’ai trouvé le stage qui correspondait parfaitement. Je suis cheffe de projet incubation à La Ruche. Ma mission principale est d’accompagner des entrepreneures à passer de l’idée à la réalisation de leur projet. J’ai commencé mon stage en février et il se termine en fin août. J’organise des évènements et des temps forts pour qu’elles (les entrepreneures) puissent rencontrer des acteurs de l’écosystème entrepreneurial. Par exemple, nous proposons des « speed dating » avec un expert qui présente un sujet : « comment créer un business model ? », « comment créer une communauté sur les réseaux sociaux ? ». Le rôle de la Ruche est de faciliter la tâche des entrepreneurs lors de la création d’entreprise. Ils sont souvent seuls par peur que leur idée soit volée s’ils en parlent. Mais c’est une erreur ! Il faut toujours être accompagné, discuter, c’est comme cela que l’on s’améliore et que l’on développe les bons contacts. Pour résumer je fais de l’accompagnement et de l’animation. Il y a certains enseignements de mon Master que j’ai pu appliquer lors de mon stage : savoir mener un entretien (cours de sociologie), réaliser un diagnostic, un état des lieux, comprendre les enjeux. Ce que j’ai aimé dans ma formation c’est que l’on nous a vraiment appris à voir le tourisme comme un moyen et non une fin !

Pouvez-vous nous décrire le sujet de votre mémoire ?

Marie-Henh : En Master 1 mon mémoire avait pour sujet le greenwashing : la publicité mensongère sur le développement durable dans le tourisme. C’est pour cela qu’aujourd’hui je souhaite travailler sur la valorisation du tourisme durable dans l’entreprise. En Master 2, nous avons un mémoire professionnel avec une première partie où nous faisons le lien entre nos recherches et notre stage, une deuxième partie qui présente les hypothèses et la troisième partie aborde l’application de ces hypothèses dans notre environnement de stage. Ce mémoire lie recherche, professionnalisation et application contrairement au mémoire de Master 1 qui est uniquement un mémoire de recherche. Je rends mon mémoire de Master 2 début septembre et la soutenance orale aura lieu à la mi-septembre.

Jennifer : J’ai une ligne directive pour mes deux mémoires de Master : l’entreprenariat social. Je vais m’appuyer sur mon mémoire de Master 1 et réutiliser certaines données obtenues lors de mes entretiens passés. Cette année, je me focalise sur les structures d’accompagnement de créations d’entreprises (incubateurs, pépinières d’entreprises, accélérateurs, couveuses…) tandis qu’en Master 1 j’avais porté mon attention sur les entrepreneurs. Je vais interroger les acteurs touristiques de la Ruche et pourquoi pas France Tourisme Lab (un réseau d’incubateurs touristiques en France). Je veux aussi savoir si l’on peut reproduire ce qui est fait en métropole sur les territoires insulaires, mais aussi si les entrepreneurs se sentent aidés, et si ces structures sont viables financièrement sur la durée.

Vous êtes toutes les deux impliquées dans la vie associative de votre campus grâce à une association : l’ ŒUF. Pouvez-vous nous en parler ?

Marie-Henh : L’ ŒUF est l’Organisation des Etudiants de l’Université de Foix dont j’ai été la chargée de communication. Ce poste de chargée de communication m’a permis de développer mes compétences. C’est une association qui avant le covid organisait des soirées, participait à la « semaine de l’étudiant » au début du mois d’octobre où des activités gratuites étaient proposées aux étudiants, et aidait à l’organisation d’ateliers (par exemple sur l’œnologie).  Depuis la crise sanitaire, l’activité de l’association a évolué. Ainsi en février 2021, nous avons organisé une collecte alimentaire avec une association de Foix et avons récupéré de quoi remplir une centaine de sacs de courses destinés aux étudiants. L’ŒUF, c’est aussi l’image des étudiants sur Foix donc il est important de montrer que nous ne nous limitons pas à l’organisation de soirées ! Nous sommes aussi là pour participer à la vie du territoire.

Jennifer : J’ai fait partie de plusieurs associations. A Foix, j’ai été présidente de l’association étudiante : l’ ŒUF. Pendant le premier confinement, nous avons organisé des animations sur les réseaux sociaux. Cela permettait aux étudiants d’échanger, de se soutenir. La récolte alimentaire dont parle Marie-Henh a été un véritable succès et les étudiants ont été ravis de voir que les ariégeois pensaient à eux.

Vous avez étudié pendant trois ans au campus de Foix, que retenez-vous de ce lieu ?

Marie-Henh : Le fait d’être dans un petit campus nous permet d’avoir des interactions avec les enseignants et les personnels administratifs que l’on peut ne pas avoir dans les autres campus. Les liens entre les étudiants sont forts et se créent vite. Les cours se font dans des classes de 25 personnes et non des grands amphithéâtres.

Jennifer : A Foix, il y a une très bonne qualité de vie, plus de relations humaines, les paysages sont magnifiques. La fac est petite, tout le monde se connaît. Nos enseignements sont de qualité et nos professeurs connus et réputés.

Quelles sont vos perspectives pour l’avenir ?

Marie-Henh : Aujourd’hui je suis très intéressée par le développement durable en interne des entreprises, pas seulement dans le domaine du tourisme. J’ai envie d’approfondir mes connaissances et mon expérience dans ce domaine. Peut-être que plus tard je changerais totalement de voie et me dirigerais vers la psychologie ou encore quelque chose qui me tient à cœur comme la protection de l’environnement et la cause animale. Et puis, mes envies de voyages sont toujours là… Alors j’attends de voir ce que la suite de mes études me réserve !

Jennifer : Pour l’après master… j’ai longuement douté et me suis demandé si je ne devrais pas faire un Master 2 en entreprenariat, puisque c’est quelque chose que j’ai appris de manière autodidacte : j’ai fait beaucoup de formations, de MOOC et j’ai utilisé mes stages pour en apprendre plus sur ce domaine. Mais finalement, je ne me vois pas reprendre une année d’étude. J’aimerais continuer d’aider les entrepreneurs et avoir un impact social et environnemental positif sur le territoire qui doit être le premier bénéficiaire des actions des entreprises. Je souhaite accompagner cette génération d’entrepreneurs, et pourquoi pas aider à développer les territoires insulaires grâce à l’entreprenariat social.

Contactez-nous

Vous voulez en savoir plus sur l’association ? N’hésitez pas et envoyez-nous un message !

Vous pouvez aussi nous contacter via les réseaux sociaux :